Ce texte est un avant-propos écrit en 2020 pour la brochure du Club Alpin Suisse qui traite de la nature, de l’escalade et qui contient des conseils sur les bonnes pratiques à adopter afin de préserver notre environnement dans le cadre de nos activités outdoor
Photo: Julia Cassou & Emilien Gigandet
La nature ne doit pas être aménagée en fonction de nos activités. Au contraire, l’Homme, la faune et la flore font partie d’un système de vie qui doit se baser sur le respect et passer par le partage de nos terrains de jeux.
Je traverse le village bordé de chalets aux balcons fleuris puis je m’engouffre dans une forêt chatoyante menant à une prairie où broutent tranquillement quelques vaches. La falaise de calcaire empreinte de nuances de gris et striée de coulées ocres qui se dresse au-dessus de ma tête attise mon excitation. Au pied de la falaise, les papillons virevoltent autour de nous. Une fois encordée, je trace mon chemin au milieu des préhensions que la nature a façonnées avec une diversité stupéfiante et qui m’offrent un terrain de jeu infini. Seule une cascade qui ruisselle le long de la falaise rompt le silence. Au loin, la belle Jungfrau enneigée nous surveille du coin de l’œil.
Ma passion pour l’escalade m’a menée jusqu’à de belles contrées sauvages. Malheureusement, j’ai également été témoin de certaines dérives causées par cette soif de s’approprier la nature comme un bien de supermarché. Je me souviens de sites victimes de leur succès où des déchets jonchent le sol, côtoyant des toilettes à ciel ouvert, où des plantes et des arbres ont été arrachés au profit d’une belle terrasse aménagée comme dans une salle d’escalade. Accablée par ce constat, je me sens parfois prise en otage de cette réalité et complice malgré moi de ce désastre.
Toutefois, il convient également de souligner certaines initiatives permettant de limiter notre impact. Par exemple, au Dévers de Moutier, un panneau WC indique l’endroit où les grimpeurs pris d’un besoin pressant peuvent se soulager et une pellette est à disposition. De mon côté, j’essaie de bannir au maximum le plastique à usage unique en prenant quelques minutes pour préparer mon casse-croûte et ramasser les déchets que je croise sur mon chemin.
Avec la popularité croissante de l’escalade indoor, on peut se questionner sur la transition de ces nouveaux adeptes de la salle vers le rocher. Si dans le passé les grimpeurs étaient principalement issus de la pratique alpine et peut-être plus sensibilisés aux questions liées au respect de la nature, la transition de cette population de l’intérieur vers l’extérieur représente un grand enjeu. Il faut ainsi mettre un point d’honneur sur l’accompagnement et la sensibilisation afin de créer une pensée collective et construire une durabilité dans nos activités outdoor.
Je me réjouis de voir la communauté de grimpeurs s’agrandir. Veillons chacun à ce que ce changement ne s’opère pas au détriment de notre environnement afin que les générations futures puissent continuer à en profiter.